Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la thérapie familiale

... sans jamais oser le demander, parce que vous pensiez que c'était réservé aux "familles à problèmes".

Emilie Lacape

11/6/20256 min read

La thérapie familiale, un espace pour remettre du lien là où il s’est tendu

Consulter en famille ne signifie pas que la famille est "malade", ou que les parents ont échoué à être de bons parents.
C’est simplement reconnaître que quelque chose s’est figé dans les relations familiales, que les échanges se sont tendus, et qu’il devient difficile de se comprendre sans s’épuiser.

La thérapie familiale offre un espace de parole guidé et sécurisé, pour que chacun puisse retrouver une place, une voix, et un sentiment d’appartenance.
Elle s’appuie sur l’approche systémique, qui considère la famille non pas comme un agrégats d'individus isolés, mais comme un ensemble vivant : quand un élément bouge, tout le système réagit.

Vous vous demandez comment cela fonctionne, pour qui c’est utile et ce qu’on y fait concrètement ?
Voici les réponses aux questions les plus fréquentes.

Qu’est-ce qu’une thérapie familiale ?

La thérapie familiale est un accompagnement qui réunit plusieurs membres d’une même famille pour travailler sur leurs relations et leurs modes de communication.
Il ne s’agit pas de trouver un coupable ni de désigner “celui qui a un problème”, mais de comprendre comment chacun, souvent sans le vouloir, participe à une dynamique qui crée du malaise ou de la tension.

Exemple :
Dans une famille où un adolescent s’isole, la thérapie permet de voir que ce retrait peut aussi parler d’un lien difficile entre les parents, ou d’une peur d’ajouter des conflits à la maison. En en parlant ensemble, le jeune n’a plus à porter seul le poids du malaise.

Quel est la spécificité de l’approche systémique en thérapie familiale ?

L’approche systémique considère que le symptôme (colère, anxiété, repli, tensions…) a un sens dans le système.
Plutôt que de se focaliser sur “la recherche du responsable qui a le problème”, on cherche à comprendre ce que ce problème vient réguler ou exprimer : un déséquilibre, un non-dit, une peur, une perte de repères.

Cette compréhension permet de sortir de la logique du blâme, pour entrer dans celle du mouvement : chacun peut essayer autre chose, un mot, un geste, une manière de répondre différente.
C’est souvent dans ces petits ajustements que les choses se dénouent.

Exemple :
Quand un enfant fait des colères répétées, il s’agit parfois d’un signal : “regardez-moi, je sens votre tension.”
En aidant les parents à se reparler autrement, les colères diminuent sans qu’on ait eu besoin de “travailler sur” l’enfant directement.

D'autre part, d'un point de vue méthodologique, l'approche systémique considère que ce n'est pas parce qu'on comprend les choses différemment, qu'on va miraculeusement arrêter de faire ce qu'on a l'habitude de faire. Dans l'approche systémique de la thérapie familiale, les échanges interactifs en séance sont une chose, mais ce qui compte véritablement, c'est la vraie vie familiale en dehors des séances. C'est pourquoi entre les séances, je demande à chacun de mettre en place certaines choses dans le quotidien.

Quel genre de choses demandez-vous de faire entre les séances ?

Les exercices que je donne à chacun entre les séances ont une fonction primordiale : ils permettent à chacun de faire des expériences émotionnelles correctrices. Autrement dit : de se rendre compte que, en pensant, en s'exprimant, ou en faisant différemment ; cela peut induit une réaction différente du reste du système familial.

C'est sur la base de ces exercices et de leur résultats que l'accompagnement peut évoluer au fur et à mesure pour s'adapter à la situation.

Concrètement, cela peut signifier :

  • observer une situation sans rien changer, pour en reparler ensuite.

  • imaginer quelque choses, d'imagination ou de réflexion

  • un changement de posture de formuler une demande,

  • modifier une habitude de communication,

  • réorganiser un moment de vie quotidienne,

  • ou simplement

Ces expériences sont essentielles : elles permettent d’ancrer le changement dans la réalité et de rendre la relation plus souple et vivante.

Comment se déroule une séance en thérapie familiale ?

Chaque séance dure environ une heure.

Il est très important pour moi d'offrir un espace apaisé, calme et neutre aux familles que je reçois. Mon objectif est de donner la parole à chacun, en le laissant libre d'exprimer ce qu'il n'est pas toujours facile de dire à la maison. Bien évidemment, l'entièreté de nos échanges demeure confidentiel.

En séance, je suis très active : je guide les échanges, je reformule, je pose des questions pour aider chacun à se dire autrement, et faire entendre son point de vue.
L’objectif n’est pas de débattre ou de régler un conflit en direct. Il est de me permettre d'observer les interactions et comprendre comment elles se construisent, d'identifier les chaines de réaction problématiques pour ouvrir ensuite de nouvelles pistes et de communication.

Comment se déroule un suivi en thérapie familiale ?

La spécificité de l'approche systémique en thérapie familiale est de ne pas requérir que tous les membres de la famille soient systématiquement présents à toutes les séances. En effet, le changement d'un seul ou plusieurs membres de la famille peut suffire à entraîner une modification du système familial tout entier.

Plutôt que de forcer la main à des personnes peu volontaires, voire carrément réfractaires à la thérapie familiale, il est bien plus efficace de se concentrer sur les membres de la famille qui sont mobilisables.

Souvent, une thérapie commence donc par une séance qui rassemble tous les membres de la famille concernés par la situation (parents, enfants). Ensuite, tout dépend des situations.

En général, la thérapie peut inclure une ou plusieurs séances individuelles avec la ou les personnes les plus susceptibles de faire bouger le système et provoquer un changement.

Quand les parents consultent pour aider un enfant

Quand un enfant va mal — refus scolaire, anxiété, troubles du sommeil, colère — la première idée est souvent de “l’emmener voir quelqu’un”.
Mais il arrive que le plus aidant soit de travailler d’abord avec les parents.

En thérapie familiale, on comprend que le symptôme de l’enfant parle souvent de quelque chose qui se joue dans le système : un équilibre fragilisé, une tension entre les parents, une inquiétude partagée mais non dite.

Les séances permettent alors de réfléchir ensemble, de remettre du sens, et d’agir autrement dans le quotidien.
Quand les adultes bougent, le climat change — et l’enfant n’a plus à porter seul la charge de ce déséquilibre.

Exemple :
Un garçon de 10 ans multipliait les crises au moment des devoirs. En séance, ses parents ont réalisé qu’ils avaient des attentes très différentes et que cela créait une double pression.
En clarifiant leur position et en ajustant leurs réactions, les crises ont rapidement diminué.

Consulter en famille, est-ce que cela veut dire qu’on est une “famille à problèmes” ?

Non, pas du tout.
Venir en thérapie familiale, ce n’est une manière de réparer une “faute”, mais plutôt de prendre soin du lien.
Toutes les familles traversent des moments de tension ou de confusion : adolescence, arrivée d’un bébé, séparation, deuil, recomposition…

Ce n’est pas un signe de faiblesse, mais de lucidité de consulter. Chercher de l’aide, c’est vouloir comprendre ce qui se passe pour retrouver de la fluidité et du calme dans la relation.

Combien de temps cela demande-t-il ?

La thérapie familiale fait partie des thérapies brèves : selon les situations, quelques séances peuvent déjà apporter des changements significatifs.
Le rythme est souvent d’une séance toutes les deux à quatre semaines, pour laisser du temps à l’expérimentation entre les rendez-vous.

Le nombre total dépend du rythme de la famille et des objectifs posés ensemble.
L’important n’est pas la durée, mais le mouvement qui se crée : un changement de regard, un apaisement, une communication qui se réouvre.

Peut-on faire des séances de thérapie familiale à distance ?

Pour une première séance en thérapie familiale, je reçois systématiquement la famille dans mon cabinet, qui se trouve en plein centre de Nice. Ensuite, cela dépend.

L'option des séances en visio est toujours disponible s'il s'agit d'une séance individuelle.

Pour des séances à plusieurs, cela dépend du nombre d'interlocuteurs, et de leur faculté à s'écouter...

De manière générale en tout cas, je ne reçois pas d'enfant de moins de 12 ans en séance à distance.

En conclusion

La thérapie familiale n’est ni un jugement ni une “mise à plat” : c’est une démarche vivante, où chacun apprend à mieux se comprendre, à entendre l’autre et à retrouver une place plus juste.

Les séances comptent, bien sûr — mais ce qui change la famille, c’est aussi ce qui se passe entre elles : ces moments où l’on tente autrement, où l’on se parle différemment, où l’on accepte que rien n’est figé.

Consulter, c’est faire le choix de remettre du mouvement dans le lien.
Et souvent, c’est ce mouvement-là qui redonne souffle à toute la famille.

Pour comprendre un peu plus concrètement comment se déroule une thérapie familiale, vous pouvez regarder ici.